Le Pendule Oui ou Non

De la Sourcellerie à la Radiesthésie

Ce que nous dit N. Léon Delattre, secrétaire général du Congrès de Radiesthésie de Lausanne

Le troisième Congrès international de Radiesthésie s’est ouvert lundi à Lausanne. Il se terminera samedi par l’assemblée générale de l’Association des Amis de la Radiesthésie. C’est à cette association, dont le siège fut longtemps à Lille avant d’être à Paris, qu’est due l’initiative de ces Congrès, dont le premier se tint en Avignon il y a deux ans et dont le deuxième souleva, dans la capitale, l’an dernier, un vif mouvement de curiosité.

Le secrétaire général de l’Association des Amis de la Radiesthésie, qui assume les mêmes fonctions pour le Congrès de Lausanne, est M. Léon Delattre. Nous sommes allé l’interroger à la veille de son départ pour Lausanne, dans les bureaux qu’occupe l’association près de la gare du Nord. Dans un petit salon, d’aspect sévère, où parvient assourdi le crépitement des machines à écrire, M. Léon Delattre s’est prêté de la meilleure grâce du monde à l’interview. Nul mieux que lui ne pouvait nous renseigner sur la situation actuelle de la Radiesthésie, sur le mouvement scientifique qu’elle a déclenché, sur le but poursuivi par l’association organisatrice du Congrès de Lausanne, puis que de ce mouvement, de cette association, de ce congrès il est à la fois l’animateur et la cheville ouvrière, après en avoir été l’un des promoteurs.

— Notre Congres de Lausanne, voyez-vons, nous dit-il, va constituer une étape importante sur le chemin parcouru par les Radiesthésistes. Il nous permettra de constater quelle rapide évolution a détruit, depuis quelques années, bien des préjugés officiels, a modifié l’opinion en faveur de nos travaux, a amené jusqu'à nous des hommes de science qu'une sorte de respect humain écartait de notre route il n’y a pas si longtemps encore.

Nous avions déjà comme président d'honneur de notre association le grand savant Edouard Branly, et le docteur Meillère, président de l’Académie de médecine, patronnait la section de Radiesthésie médicale; or voici que je viens de recevoir du professeur d’Arsonval, de l'Institut, une réponse qui nous comble de joie. L'illustre physicien, au cours d'un entretien qu'il a bien voulu m’accorder, a accepté le patronage d'honneur de notre Congrès. Cette marque de confiance et d'estime de l’éminent savant nous apporte un précieux témoignage de sympathie et un encouragement dont nous lui sommes infiniment reconnaissants car il y a là un beau geste de courage scientifique.

— Avec un tel patronage on ne pourra plus dénier à vos travaux leur caractère scientifique ?

— Beaucoup, heureusement, l'ont déjà reconnu. ?'enseigne-t-on pas la Radiesthésie, depuis quelques mois, à l'école du génie de Versailles ? Cet exemple a d'ailleurs été suivi par les militaires anglais et, à ce propos, je vous signale que M. le docteur Wright, médecin de la Cour d'Angleterre, sera des nôtres à Lausanne.

On ne peut plus vraiment contester que la Radiesthésie soit une science. Mais toute neuve encore et en pleine croissance, il ne tant pas être trop exigeant vis-à-vis d'elle, ni trop impatient. Un sourcier n'est qu'un homme, donc sujet à erreur et à des variations. Tant que des appareils n'auront pas remplacé le sourcier, il demeurera un certain empirisme. Je sais bien qu'il en existe actuellement de plusieurs sortes, mais aucun n'est un détecteur aussi sensible que le sourcier et pas un ne peut fournir encore les précisions sans lesquelles on n'obtient pas de résultats pratiques.

Je ne prends pas à mon compte la boutade d'un de mes amis : "Des appareils enlèveraient à nos travaux toute poésie". Mais, outre qu'il ne tant pas tomber prématurément dans le domaine commercial, il est certain que le corps humain est une merveille qui s'ignore. Les facultés qui nous ont été données à la Création sont vraiment formidables. Des sourciers comme les abbés Bouly et Mermet, comme le frère Padey récemment décédé, ont en eux des possibilités inouïes.

— Tous ne les valent pas.

— Bien sûr, mais je pourrais vous en citer cent autres qui sont de premier ordre. D'ailleurs il est avéré que 90 pour cent des hommes possèdent, plus ou moins, les qualités de sensibilité nécessaires pour faire d'honnêtes sourciers. Il ne s'agit pas tant d'un don, que d'une éducation, d'un entraînement.

— Aurons-nous donc, un jour, une école de sourciers ?

— Pourquoi pas ? Je vois très bien, surtout quand auront été déterminées les lois fondamentales de la Radiesthésie, des professeurs titrés enseigner la nouvelle science et délivrer des diplômes d'ingénieurs radiesthésistes. Ce sera la meilleure façon d'éliminer les charlatans.

— Il faudrait alors faire un choix parmi les nombreuses méthodes employées actuellement par les sourciers.

— Tenez, voici justement l'un des buts de notre association. J'ai eu l'idée de faire rencontrer les sourciers pour qu’ils mettent en commun leurs observations et qu'ils confrontent leurs méthodes. Chacun tenait à sa manière et, s'il avait des résultats, en gardait jalousement le secret. Dans ces conditions, il n'était pas possible d'enregistrer de grands progrès d'ensemble et le terrain scientifique nous était interdit. Notre association a permis ainsi à beaucoup de se dépouiller d'un esprit trop commercial. Elle n'a que des buts désintéresses et, je le répète, elle veut se maintenir dans un cadre scientifique. Nous ne recevons pas un centime d'allocation et nous ne sommes pas encore reconnus d'utilité publique.

Outre nos rencontres, nos comités, nos conférences, nos excursions, nos congrès, le bulletin que nous éditons mensuellement est ouvert à tous nos adhérents qui ont des communications intéressantes à faire. Toute découverte nouvelle peut ainsi profiter à tous, toute méthode mise au point par l'un peut être expérimentée par les autres. Peu de sociétés savantes ont autant d'échanges mutuels que la nôtre et notre bulletin est certainement l'une des publications scientifiques des plus denses qui soient.

— J’ai pu me rendre compte, en ce qui me concerne, que c’était aussi un excellent organe de vulgarisation.

— C'est encore l'un des buts de notre groupement, qui s'intitule, ne l'oubliez pas, "Association des Amis de la Radiesthésie". Il fait appel non seulement aux baguettisants ou pendulisants, mais il s'adresse aussi à toutes les personnes qui s'intéressent à ces travaux et désirent encourager les chercheurs et suivre leurs efforts.

— Combien êtes-vous ?

— Un peu plus d'un millier et, en nombre sensiblement égal, des ingénieurs et des médecins, des prêtres et des religieux, des officiers et des professeurs. Vous avez pu voir qu'une grande activité règne dans nos bureaux. Nous avons un courrier quotidien de 40 à 50 lettres. On nous demande des conférences de tous les côtés, notamment de l'étranger; je viens d'être sollicité pour Prague. L'un des nôtres, M. Antoine, est allé fonder une section au Mexique et nous avons une filiale anglaise de 300 membres.

N’oubliez pas qu’il y a, même en France, d'autres associations que la nôtre, qui sont organisées dans des cadres régionaux, et qu'en Allemagne, en particulier, deux centres de radiesthésie très florissants sont installés à Berlin et à Munich. C'est donc un très fort et très large courant qui porte vers l'avenir une science à laquelle ne manquent plus que des laboratoires bien équipés et des encouragements plus officiellement accordés.

Ne croyez pas que M. Léon Delattre nous donne ces renseignements avec ce ton de sécheresse dans l’exactitude qui pourrait convenir à son rôle d’administrateur. On le sent, au contraire, passionnément conquis par cette science dont les pas hésitants nous conduisent vers des horizons jusqu’à présent inaperçus dans le ciel des possessions humaines. Il nous parle avec l’âme d’un pionnier, un peu comme ces premiers hommes volants qui entrevoyaient, de leurs sauts ridicules à vingt mètres du sol, les bonds prestigieux de l’avenir. Sa voix se fait plus pressée et plus pressante encore pour nous énumérer, avec un accent d’acte de foi, les possibilités multiples de la Radiesthésie.

— On s'adresse maintenant aux sourciers dans les cas à première vue les plus invraisemblables : En chimie, pour décomposer les éléments d'un colorant sur une étoffe; en vénerie, pour situer à distance le gibier dans la forêt; dans la pèche, pour la quelle une société vient de s'adjoindre les services d'un sourcier afin de déceler l'emplacement des bancs de Poisson. Quant à la médecine, je crois qu'elle ne tardera pas à être bouleversée par nos méthodes. Actuellement une centaine de médecins utilisent la Radiesthésie pour faciliter leur diagnostic. Dans trois ans, il ne sera pas possible qu'un seul médecin ignore délibérément les services qu'elle peut lui rendre. D'autant que la thérapeutique peut en être transformée. Si l'on admet, comme l'état actuel des recherches permet de le supposer, que la maladie est produite par un arrêt du circuit magnétique qui parcourt nos cellules, la guérison devra être obtenue par l'électro-magnétisme. Et l'influence des failles et des courants d'eaux souterrains sur l'organisme humain... Il y a là mille faits déconcertants, derrière lesquels la vérité se cache. On finira bien par l'atteindre en tâtonnant. Ondes sonores, ondes lumineuses, ondes hertziennes, radiations du spectre ont livré peu à peu leur secret. Le monde des ondes n'est pas encore entièrement exploré. Les ondes radiesthésiques commencent à leur tour de nous étonner, elles n'ont pas fini...

Des sourciers aux dons extraordinaires, des médecins doublés de physiciens se sont attachés à dévoiler "le mystère captivant des ondes". Nous irons auprès d’eux chercher des explications.

Louis Terrenoire

L’Aube, 20 septembre 1934